Un débat éternel, 53 ans après les faits sur l’excellent blog d’Yves Ballu : http://yvesballublog.canalblog.com/
Instructif sur les mentalités d’une époque pas vraiment révolue…
Un extrait qui fait allusion au récent secours spéléo du gouffre Romy à la Pierre Saint Martin :
Vincendon et Henry : coupables ou victimes ?
Je reviens sur cet extrait du communiqué de la Compagnie des guides (publié en 1957) que j’ai mis hier en ligne sur le blog : « … ceux qui, par esprit de vanité, entreprennent des courses au-dessus de leurs possibilités et de leur compétence […] font bon marché des risques auxquels ils exposent les sauveteurs dont ils escomptent l’intervention. Nous estimons que Vincendon et Henry se sont placés volontairement dans cette situation exceptionnelle. […] On ne peut, même pour sauver deux hommes, exposer avec certitude la vie de 10 ou 15 sauveteurs »
Il me suggère deux commentaires :
– D’abord, on ne dénombre heureusement aucune victime parmi les « 10 ou 15 sauveteurs » dont la vie a failli être exposée « avec certitude ». Et pour cause, ces 10 ou 15 sauveteurs n’ont été dans cette affaire que virtuels. Seuls les moniteurs de l’EHM, les amis alpinistes de Vincendon et Henry, et Lionel Terray se sont mobilisés pour tenter quelque chose. Et aucun n’a jamais repris à son compte une telle condamnation. Tous ceux qui les ont connus peuvent en témoigner : Gilbert Chappaz, par exemple (comme ce mot lui va bien !) n’a jamais exprimé que des regrets pour n’avoir pas pu tenir sa promesse de revenir chercher les victimes après les avoir installées dans l’épave de l’hélicoptère (en réalité, il n’en a pas eu l’autorisation). Pas l’ombre d’une condamnation, ni même d’un reproche. Aujourd’hui encore, on entend ce genre de propos – hélas, et pas seulement pour la montagne – il en a été question récemment pour des spéléologues. Mais jamais dans la bouche de ceux qui partent au secours des autres. Par exemple, je peux témoigner pour avoir eu le privilège de participer avec eux à des opérations de secours, que les sauveteurs du PGHM, ne se livrent jamais à cette arithmétique obscène. D’une façon générale, ce sont ceux qui restent dans la vallée qui condamnent « ceux qui, par esprit de vanité, entreprennent des courses au-dessus de leurs possibilités ». Sans doute pour calmer leur (mauvaise) conscience.
– Mais admettons que Vincendon se soient rendus coupables. De quoi?… de vanité, par exemple. Admettons. Ils méritaient donc un châtiment. Normal, ils étaient coupables. Hé bien, la morale est sauve, puisqu’ils ont bien été condamnés. A la peine maximale. La peine de mort ? Non, la peine maximale : la peine d’agonie, jusqu’à ce que mort s’en suive.